Je voulais à tous prix faire partager à Barbara une région française incomparable, riche d’un grand nombre de sites naturels, des curiosités monumentales qui prennent rang parmi les plus grandioses de France, les gorges du Tarn et les causses à un degré moindre. De vastes tables calcaires aux rebords escarpés séparées par des vallées profondément encaissées, ces tables dont la surface est sèche, pierreuse et aride sont les Causses. Ces gorges très pittoresques au fond desquelles coule un filet d’eau qui peut se transformer rapidement en un fougueux torrent, sont les canyons.
Le voyage itinérant se déroulera en total autonomie avec sacoches sur six étapes. Le kilométrage journalier tournera autour de 33 km à 48 km pour la plus grande des distances, courtes certes, mais du kilométrage de qualité, et c’est le principal pour des membres d’une fédération dite "cyclotourisme".
Je fixe le départ pour la gare de Lyon à ma compagne … de route dès 7h15 et à vélo. Le trafic auto est faible, la température fraiche et il ne pleut pas, c’est l’essentiel. Nous installons nos vélos dans le fourgon réservé spécialement à cet effet.
Le train démarre à 8h47 pour un trajet long de 8 heures ! qui nous fera traverser de nombreux aspects géographiques de la France. Qu’il est beau, ce pays. Le printemps fait ressurgir un kaleidoscope de couleurs et le soleil illumine toute cette végétation renaissante après un hiver de plus en plus discret.
La Nièvre puis l’Allier avec Vichy, veille d’une éléction présidentielle dont l’un des prétendants aurait put être de cet ancien gouvernement de sinistre memoire. Le Puy de Dôme avec Clermont-Ferrand, où le train se sinde en deux : pour Marseille, le “Cévenol” à travers les Cévennes, et pour Béziers, “l’Aubrac”, le notre, qui suit un parcours incroyablement pittoresque, du jamais vu pour moi sur une ligne de chemin de fer française, la “number one” en tous cas.
Nous sommes proche de l’arrivée à Millau (Aveyron), et après quelques averses, nous surplombons le Tarn au dessus de monstrueuses falaises à vous couper le souffle ; et que dire de ces petits villages étagés au pied de la rivière, un tableau admirable. La température est bien fraiche en débarquant du train vers 17h.
Millau est une petite ville animée au confluent du Tarn et de la Dourbie, dans une vallée riche et verdoyante. La cité du gant est un bon point de départ d’excursions, notamment dans les Causses et les gorges du Tarn ; tiens, c’est justement ce que nous allons faire.
Le soleil est bien présent ce matin et la température est fraiche. Après le petit déjeuner nous sortons de Millau vite fait par une petite route surplombant le Tarn. Le paysage est très plaisant et la nature est toute verte. Nous remontons le Tarn avec des vues lointaine sur quelques villages à moitié perchés sur les massifs, un tableau magnifique. La chaussée pour le moment est assez large car nous ne sommes pas encore au début des gorges, mais on y arrive bientôt. Justement au pont enjambant le Tarn au confluent de la Jonte, les gorges du Tarn apparaissent. La chaussée constamment tracé au fond des gorges est toujours pittoresque et sans monotonie, grace aux mille aspects du canyon dont les teintes varient suivant les heures du jour. Le ciel est chargé de nuages qui ne dit rien qui vaillent la température se rafrachit de plus en plus, mais nous sommes proche du but, apparait dans un charmant site, Les Vignes, petit village aux carrefours des Causses Méjean et de Sauveterre.
Après l’installation à l’hôtel et un déjeuner végétarien (salade du Gévaudan), nous repartons pour l’après-midi mais cette fois à pied. Nous montons sur le Causse Méjean à 6 km par une route bitumée ; de bien long lacets nous permettent au fil de notre progression d’observer un paysage vertical vertigineux. Des versants se dressent de magnifiques escarpements, curieusement découpés, qui offrent toutes les teintes intermédiares entre le noir et le roux. Une succession de parois abruptes, de vigoureuses assises, de bans rocheux, de corniches, de surplomb et de rebords tabulaires, nous prenons notre pied. Les vautours tournoient au dessus de nos têtes à la conquête d’un énième repas, tandis qu’au détour de la route la vue sur le canyon est sublime.
Au sommet proche des 900 mètres d’altitude, Les Vignes (420 m) en contrebas semble bien miniscule et lointain. Nous redescendons en compagnie de quelques goutelettes de pluie, rien de bien méchant, satisfait de cette balade pédestre de 12 km où l’on peut mieux apprécier le paysage qu’à quatre ou deux roues.
Plus loin, les Détroits constituent la partie la plus belle et la plus resserrée du canyon, deux hautes murailles plongeant à pic dans la rivière jusqu’à plus de 400 mètres au dessus du Tarn. Le défilé est admirable avec ses parois colorées que enserrent la rivière. La Malène, petit village aux ruelles bordées de vieilles maisons avec son église romane du 11ème siècle fait cligner nos yeux. Appellé le mauvais trou, la révolution mit le pays à feu et à sang. Les nobles cruellement pourchassés se réfugiaient dans les grottes qui s’ouvrent dans les falaises du canyon.
Par la suite, le château de la Caze (15e siècle), transformé en hôtel … quatre étoiles occupe un site romantique. Ce décor d’ombrages, de vieilles pierres et de rochers surplombants semble sortir d’un conte ! De nouveau des tunnels au milieu de gigantesques rochers dont les hautes murailles aux teintes rougeâtres forment le cirque de Pougnadoires, tandis que les maisons du village sont encastrés dans la roche. Et cela continue, on ne s’ennuie jamais, toujours les yeux captent quelque chose: l’incroyable joli village de Saint-Chely à l’entrée d’un gigantesque “bout du monde” au pied de superbes falaises.
Puis St Enimie qui s’étage au bas des falaises escarpées qui bordent une boucle du Tarn à l’un des passages les plus resserrés du canyon. Le fond de la gorge est très verdoyant et le pont enjambant le Tarn pittoresque, un très beau site. La route serpente assez souvent, elle n’est jamais plate mais le dénivelé est assez faible. Le vent nous jouent parfois des caprices. Les châteaux se suivent et ne se ressemblent point ; ils ne sont pas monstrueux, mais leur style est vraiment chouette.
Le terme de l’étape arrive à point nommer juste après le pont gothique de Quézac, détruit pendant les guerres de Réligion, il fut réédifieé au 17e siècle. Le jardin de la Lozère est en vue, Ispagnac et sa belle vallée plantée d’arbres et de vignes, où se développe aussi la culture de la fraise. Le village à aussi son charme avec ses vieilles maisons et surtout son église du 12e siècle.
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Le soleil a fait son apparition lorsque le déniveler augmente en prenant la route du Mont Aigoual, charmante chaussée étroite serpentant parmi une importante végétation. Nous sommes à pied d’oeuvre pour l’ascension du col de Perjuret (1028 m), célèbre pour les nostalgiques du Tour de France, qui mit fin à la jeune et déjà riche carrière de Roger Rivière dans le ravin du col. La montée franche dure 5 km à 8 pourcent de pente moyenne. Nous ne montons tranquillement avec chacun ses petities peines, car le vent souffle avec furie, mais la pente y est aussi pour quelqechose. Après un court crochet pour obtenir un col à proximité nous entamons la descente de 11 km sur Meyrueis (706 m). Quelques rafales de vent aux détours de lacets, une chaussée pas toujours correcte et nous sommes rendus à notre étape sous un ciel très assombrit. Le petit bourg se dresse à l’entrée du canyon de la Jonte. L’atmosphère y est très pure pour le moment, car ce soir vont affluer les premiers toursistes de l’Ascension.
Nous descendons légèrement sur l’Aven-Armand, pas encore de mouvement de foule à 9h45 et nous attendons sagement la descente dans l’abîme parmi des touristes cyclos de Maisons-Lafitte et St Ouen l’Aumone. C’est par funiculaire que l’on accède 60 mètres plus bas au belvédaire où l’on jouit d’un spectacle merveilleux. Superbe, magnifique, quel aspect féérique à ce rêve des mille et une nuits, une véritable forêt d’arbres de pierre où se concentre plus de 400 stalagmites aux formes fantastiques dont la plus haute atteint 30 mètres (record du monde).
Après cette promenade envoutante, nous laissons derrière nous cette merveille souterraine du monde, et redescendons sous parfois quelques gouttes à Meyrueis. La ville commence à se remplir de touristes composé principalement de cyclos, eh oui, cela débouche de toute part, les hôtels sont complets, tant mieux pour le département de la Lozère !
La chaussée s’élève en lacet d’un bon pourcentage jusqu’à la côte 900 mètres sur le Causse Noir qui est plutot vert de ce côté ci. Des goutelettes nous accompagnent parfois quelques instants, rien de bien grave en tous cas. Nous sommes vite rendus au pied de la grotte après 9 km de selle. Elle se situe au bord de la falaise au dessus des gorges de la Jonte, avec un panorama spectaculaire.
La visite s’éffectue en groupes accompagné d’un guide très experimenté, et c’est par l’entrée naturelle que l’on accède horizontalement à une des plus vastes salles souterraines de France. 1km 200 de parcours dans un monde féérique et incomparable, la grotte séduit par la diversité de ses concrétions et de ses couleurs. Nous faisons d’abord le tour de cette immense cavité au coeur de toutes sortes de cristallisations vivants aux couleurs naturelles très ccentuées (stalagtites, stalagmites, fistuleuses, etc…)
La seconde partie du parcours, ancien lit de rivière souterraine, abrite les plus imposantes concrétionsde la grotte : coulée de calcite de 2000 m2 (unique pour ses dimensions), colonnes majestueuses, draperies, lacs cristallins, etc … c’est inouï, du jamais vu, nous sommes abasourdis, on peut mourir après cela ! La visite étant terminée, nous devons remonter des profondeurs à la surface et la sortie s’éffectue dans la falaise du canyon de la Jonte. Après ce moment inoubliable, nous piques niquons légèrement et rentrons à Meyrueis par un petit détour dans le Causse Noir. La météo est franchement lamentable, éclaircies, averses et ainsi de suite toute la journée.
D’abord la route étroite descend dans une jolie vallée boisée. Il fait assez frisquet entre ses hautes falaises, puis la rivière en contrebas se fraye un chemin entre les hautes murailles du Causse Noir et du Causse Méjean, creusant un magnifique canyon jusqu’au Rozier (390 m) où elle se jette dans le Tarn. Ce site est très passager, il marque l’entrée des gorges du Tarn, et le charmant village de Peyreleau collé au Rozier est pittoresque, étagé sur les pentes escarpées d’une butte.
Nous pédalons à un train de sénateur car nous ne voulons point arriver trop tôt à Millau, mais malgré cela les kilomètres défilent surtout grace au terrain favorable à la descente. Nous évitons intelligement la route principale longeant le Tarn pour suivre la rive opposée difficile d’accès, la vue y est plus grandiose de ce côté ci sur les villages perchés au dussus de la rivière.
Le retour à la civilisation laisse un gout amer, de plus que la pluie à refait son apparition, mais le bilan du voyage est très positif : des paysages d’une merveilleuse beauté et les visites des grottes resteront des moments inoubliables, quant à la méteo médiocre, on l’oubliera certainement.